Marchés et économie

La NYCB provoquera-t-elle une nouvelle crise des banques régionales?

Les immeubles du centre-ville de Los Angeles, en Californie, photographiés à une altitude d'environ 2 000 pieds, directement au-dessus du centre de la ville.
Points importants à retenir
Inquiétudes à l’égard des banques
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Le 30 janvier, les inquiétudes suscitées par les banques régionales ont été ravivées lorsque la New York Community Bank (NYCB) a révélé que ses bénéfices étaient nettement inférieurs aux attentes. 

Impact sur le secteur
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Même si cela a un impact sur les cours des actions des banques régionales, nous croyons que les problèmes restent circonscrits à une faible proportion de petites banques.

Réaction des marchés
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L'indice S&P 500 n'a pas été touché par ces mauvaises nouvelles et a progressé malgré les manchettes sur les banques; il a même franchi la semaine dernière la barre des 5 000 points pour la première fois de son histoire.

Au printemps dernier, les actions des banques régionales se sont effondrées à la suite de la faillite de plusieurs petites banques, à commencer par la Silicon Valley Bank. La situation s’est finalement calmée, mais nous avons toujours eu le sentiment que, même si elle était sous contrôle, il pourrait y avoir des flambées issues de quelques banques qui subiraient des pressions. Fin janvier, les craintes d’une crise des banques régionales ont été ravivées lorsque la New York Community Bank (NYCB) a révélé que ses bénéfices étaient nettement inférieurs aux attentes. Bien que les cours des actions de certaines banques régionales aux États-Unis et ailleurs dans le monde s’en ressentent, nous croyons que ces problèmes sont isolés et se limitent à un petit nombre de banques de plus petite taille.

Que s'est-il passé à la New York Community Bank?

La plupart des problèmes de la New York Community Bank (NYCB) lui sont propres. Ils découlent en partie de son acquisition des actifs de la Signature Bank au printemps dernier, lorsque cette dernière a fait faillite; la NYCB a ainsi été placée dans une catégorie de banque différente, la catégorie IV (actifs supérieurs à 100 milliards de dollars), ce qui fait qu’elle est assujettie à une réglementation globalement plus stricte, notamment à des exigences plus strictes en matière de fonds propres, de liquidités et de pertes sur prêts.

La décision de la NYCB de renforcer la liquidité de son bilan en conformité avec son groupe de pairs a largement contribué à ses bénéfices décevants et à la réduction de son dividende. En outre, la Banque, qui a une exposition relativement élevée à l’immobilier commercial, a radié certains prêts en difficulté au quatrième trimestre, mais deux prêts assortis de circonstances particulières sont à l’origine de la majeure partie des radiations effectuées au cours de la période.

Les investisseurs sont manifestement inquiets au sujet de la NYCB, car le cours de l’action a chuté de façon spectaculaire depuis l’annonce de ses résultats, mais il s’est stabilisé au cours des derniers jours de bourse. La NYCB a un ratio de fonds propres de catégorie 1 relativement bas; il est inférieur à 10 % contre 12,3 % en moyenne pour les banques américaines.1 Du côté positif, la NYCB a un pourcentage plus élevé de dépôts assurés, ce qui signifie moins de risque de fuite des dépôts, et ses résultats d’exploitation sous-jacents sont très bons. Enfin, le départ de cadres supérieurs pourrait faire ressortir des problèmes spécifiques à la NYCB.

Quel est l’impact sur les banques régionales américaines?

Les déboires de la NYCB ont provoqué un effet de halo négatif, semblable à celui observé au printemps dernier, qui a commencé à se répercuter sur les banques régionales américaines et étrangères. L’indice S&P 500 des banques régionales a chuté de 8,9 % depuis le début de l’année.2 Les obligations des banques régionales américaines ont vu leurs écarts se creuser, ce qui indique que les marchés les considèrent comme plus risquées. Selon nous, seul un petit sous-ensemble de banques régionales américaines présente des vulnérabilités majeures. D’ailleurs, ce sont leurs actions qui sont le plus pénalisées par les investisseurs.

En réalité, les banques américaines sont généralement bien capitalisées. Selon les plus récentes données sectorielles agrégées de la Réserve fédérale américaine (Fed), elles disposent de suffisamment de liquidités pour couvrir l’intégralité des prêts immobiliers commerciaux.3 Le problème est que, de manière générale, les petites banques ont plus de prêts et les grandes banques plus de liquidités, ce qui explique la faiblesse récente des actions de certaines banques régionales.

En fait, au cours des six derniers mois, le pourcentage des actifs totaux des grandes banques considérés comme des actifs liquides de qualité supérieure a augmenté, alors que celui des petites banques a diminué.4 Cependant, bon nombre des problèmes qui ont créé des tensions pour la NYCB sont propres à cette banque.

Certaines banques mondiales subissent des pressions

La semaine dernière, les inquiétudes se sont propagées en dehors des États-Unis. Cependant, cela semble se limiter à un petit groupe de banques fortement exposées à l’immobilier commercial américain, ce qui pourrait injustement pénaliser le cours de leurs actions. La Banque centrale européenne est néanmoins en alerte en ce qui concerne l’immobilier commercial et aurait demandé aux banques de gérer les risques liés à l’immobilier commercial et d’augmenter leur capital.

 Trois éléments clés concernant le marché immobilier commercial américain

Qu’en est-il de l’immobilier commercial américain en tant que tel? Voici trois éléments clés que les investisseurs doivent garder à l'esprit :

  • Le taux d’occupation des bureaux aux États-Unis s’améliore lentement. Le baromètre Kastle de retour au travail, qui mesure les conditions de retour au bureau dans 10 grandes villes américaines, s’est nettement amélioré ces dernières semaines. Le taux actuel est de 53 %, contre 48,5 % pour la semaine du 10 janvier.5 Si les taux d’occupation des catégories de biens immobiliers autres que les bureaux ont baissé dans les secteurs industriels et des appartements pour se situer juste en dessous des seuils d’avant la COVID, ils restent nettement plus élevés que les plus bas enregistrés pendant la crise financière mondiale. De même, les taux d’occupation des immeubles de commerce de détail américains autres que des centres commerciaux sont à leur plus haut niveau en deux décennies.6
  • Une forte proportion de prêts immobiliers commerciaux américains n’arriveront pas à échéance et ne seront pas prêts à être refinancés avant 2025, voire au-delà. Il est vrai que 2024 est une année importante en ce qui a trait aux échéances, puisque 17 % de tous les prêts immobiliers commerciaux américains vont arriver à échéance cette année.7 Cependant, cela signifie que la vaste majorité des prêts immobiliers commerciaux n’arriveront à échéance que plus tard. En fait, 17 % des prêts immobiliers commerciaux vont arriver à échéance en 2025 et 58 % n’arriveront pas à échéance avant 2026 ou même plus tard; à ce moment-là, les taux d’intérêt aux États-Unis seront peut-être beaucoup moins élevés.7
  • En effet, le taux de défaillances dans le secteur des immeubles de bureaux a augmenté; le taux de défaillances des hypothèques d’immeubles de bureaux aux États-Unis a augmenté de 48 points de base pour atteindre 6,30 %.8 Par contre, le taux de défaillances d’autres pans du marché immobilier commercial a en fait diminué. Par exemple, le taux de défaillances des hypothèques d’immeubles industriels a reculé de 17 points de base, pour s’établir à 0,40 %.8 Rappelons que les immeubles de bureaux ne sont qu’une composante du marché immobilier commercial.

Les problèmes des banques semblent circonscrits

En résumé, nous croyons que les problèmes des banques restent isolés, limités à une faible proportion de petites banques. Quelques banques éprouveront peut-être des difficultés à un moment ou à un autre tant que les taux d’intérêt seront élevés mais, dans l’ensemble, le secteur est rentable et stable. Par ailleurs, notre scénario de référence, qui prévoit un « atterrissage en dents de scie », suivi d’une réaccélération de la croissance économique aux États-Unis pourrait se traduire par une augmentation de la croissance des prêts et une amélioration de la capacité des emprunteurs à assurer le service de leurs dettes. Par ailleurs, l’éventuel assouplissement de la politique monétaire pourrait soutenir la croissance, tout en diminuant la pression sur les marges nettes d’intérêts, en réduisant la nécessité d’augmenter le taux de rémunération des dépôts.

Le signal le plus fort qui indique que le marché dans son ensemble ne s’inquiète pas de l’immobilier commercial est peut-être le fait que les récentes manchettes n’ont pas empêché l’indice S&P 500 de franchir la barre des 5 000 points pour la première fois de son histoire le 9 février.9 Vous vous souvenez peut-être que le S&P 500 n’a pas atteint les 2 500 points avant septembre 2017.10 Compte tenu de toutes les difficultés rencontrées entre cette date et aujourd’hui, il est évident que les marchés boursiers ont réellement escaladé un « mur d’inquiétudes ».

Cela nous rappelle l’importance de conserver ses placements à long terme (et de bien diversifier son portefeuille), plutôt que de se laisser perturber par les grands titres de l’actualité. (L’indice S&P 500 n’a pas été le seul à franchir un jalon la semaine dernière. L’indice Nikkei 225 a dépassé les 37 000 points en cours de séance pour la première fois en 34 ans.11)

Dates à surveiller

L'indice des prix à la consommation américain, qui sera dévoilé cette semaine, sera suivi de près. La Fed cherche à confirmer la forte tendance désinflationniste; cette statistique pourrait donner cette confirmation - ou non - et pourrait faire bouger les marchés.

 Rédigé en collaboration avec Andras Vig, Mike Sobolik et Nicholas Buss

Dates à surveiller :

Date

Rapport

Ce qu'il nous dit

13 février

Taux de chômage au Royaume-Uni et salaire moyen

Donne une indication de la santé du marché du travail.

 

IPC des États-Unis

Suit la trajectoire de l'inflation.

 

14 février

IPC du Royaume-Uni

Suit la trajectoire de l'inflation.

 

 

Production industrielle de la zone euro

Donne une indication de la santé économique du secteur de l’industrie.

 

15 février

Ventes au détail aux États-Unis

Sondent la demande des consommateurs.

16 février

Ventes au détail au Royaume-Uni

Sondent la demande des consommateurs.

 

IPP (indice des prix à la production) des États-Unis

Mesure la variation des prix de vente reçus par les producteurs nationaux pour leur production.

 

 

 

Sondage de l’Université du Michigan sur les attentes des consommateurs (résultats préliminaires)

Analyse les attentes en matière d’économie et de dépenses personnelles des consommateurs américains.

Découvrez ce à quoi nous nous attendons des marchés et de l’économie en 2024 : Lisez nos Perspectives de placement pour 2024 et écoutez notre baladodiffusion.

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Notes de bas de page

  • 1

    Source: United States Banks Index, Datastream, 31 décembre 2023.

  • 2

    Source: Bloomberg, L.P., 9 février 2024

  • 3

    Source: « Assets and liabilities of commercial banks in the United States », Réserve fédérale américaine, 9 février 2024.

  • 4

    Source: « Assets and liabilities of commercial banks in the United States », Banque de réserve fédérale de New York, 8 février 2024.

  • 5

    Source: Baromètre Kastle de retour au travail, 25 février 2024

  • 6

    Source: CBRE-EA, 31 décembre 2023

  • 7

    Source: MSCI Real Assets, 26 septembre 2023

  • 8

    Source: Trepp CMBS Research, février 2024

  • 9

    Source: « S&P 500 closes above key 5,000 level for first time », CNN Business, 9 février 2024

  • 10

    Source: Bloomberg L.P., septembre 2017.

  • 11

    Source: « Japan’s Nikkei hits fresh 34-year highs; most Asian markets are closed for Lunar New Year holiday », CNBC, 9 février 2024