Les cycles de resserrement de la politique monétaire se terminent presque toujours par des accidents. La crise des sociétés d’épargne et de crédit au début des années 90, la « débâcle technologique » du début des années 2000 et la crise du logement en 2008 ont toutes commencé après une série de hausses de taux d’intérêt de la Réserve fédérale américaine (Fed) visant à lutter contre l’inflation. C’est la raison pour laquelle le marché s’est tellement concentré sur l’inflation au cours de la dernière année. Lorsque le taux d’inflation ne baisse pas, la Fed doit continuer à augmenter les taux d’intérêt, la croissance se détériore et le risque de crise augmente. Hélas, ces craintes sont en voie d’être validées. Les banques Silicon Valley Bank et First Republic sont les premiers cas de banques dont les modèles d’affaires et les bilans sont mal préparés à une conjoncture de hausse des taux d’intérêt et au risque de récession qui augmente sans cesse. Sont-ils les fameux canaris dans la mine de charbon du système bancaire américain?
Les petites banques spécialisées américaines défraient la manchette
Avant de commencer à évoquer les souvenirs des ruées aux guichets des banques, regardons ce qui se passe aujourd’hui. Le marché se concentre sur les petites institutions financières régionales qui se spécialisent dans l’octroi de prêts. Par exemple, la Silicon Valley Bank1 exerce ses activités dans le créneau du financement des sociétés technologiques en phase de démarrage. En ce moment, ces sociétés ont du mal à amasser des fonds, car les investisseurs en capital de risque qui les finançaient ont développé une plus grande aversion au risque. Les sociétés en phase de démarrage financent leurs activités en retirant des sommes qu’elles ont en dépôt à la Silicon Valley Bank, qui doit vendre des actifs pour répondre à la ruée vers les dépôts. La Silicon Valley Bank a dû vendre une grande quantité de bons du Trésor américain qui avaient perdu beaucoup de valeur, ce qui a entraîné des pertes plus élevées que celles qu’elle avait comptabilisées.
Pour mettre le tout en perspective, sachez que la Silicon Valley Bank représente un dixième de la taille de JP Morgan, plus grande banque du pays.2 Néanmoins, ce n'est jamais bon signe lorsque les banques sont obligées d’amasser des fonds dans un court laps de temps. Lorsque les investisseurs ont flairé le danger, ils ont tourné leur attention vers la prochaine banque exposée au risque de taux d'intérêt et au risque de crédit spécifique, puis à la suivante. La First Republic Bank, fortement exposée aux marchés immobiliers côtiers, semble être la prochaine sur la liste. Avis aux intéressés, la First Republic Bank est vingt fois plus petite que la JP Morgan.3
Dans l’ensemble, les banques américaines semblent bien capitalisées
La meilleure nouvelle est que le système bancaire américain, après une longue période de surveillance rigoureuse dans la foulée de la crise financière mondiale, semble beaucoup mieux capitalisé qu’il ne l’était lors des crises précédentes, y compris celle de 2008.4 La Federal Deposit Insurance Corporation estime que, globalement, le système bancaire devrait pouvoir absorber les pertes potentielles qui se profilent à l’horizon.
Ces épisodes bancaires ont tendance à perdurer jusqu’à ce qu’il y ait une intervention politique nécessaire. Les premières règles d’une banque centrale sont : 1) ne jamais nuire à la situation; et 2) protéger le système bancaire. Les taux des bons du Trésor américain plongent pendant que la banque centrale gère les anticipations de hausses de taux d’intérêt.5
Privilégier le long terme
Je me dois de rappeler aux investisseurs à long terme que ces situations ont toujours engendré de bonnes occasions de placement. Au bout du compte, de nombreux investisseurs qui détenaient des placements sur les marchés boursiers américains pendant la crise des sociétés d’épargne et de crédit, la débâcle technologique et la crise du logement se sont bien tirés d’affaire.6