Nous avons déjà utilisé l’analogie des montagnes russes, et il est temps de l’utiliser de nouveau, car nous avons progressé dans cette remontée du marché la semaine dernière. L’indice S&P 500 est maintenant inférieur de moins de 4 % à son sommet historique1, après une excellente semaine pour les actions. L’indice allemand DAX a clôturé la semaine à un plus haut historique et a connu une augmentation de près de 19 % en 20252. Même si les actions ont progressé, le dollar américain a repris sa tendance baissière3.
Une série de points clés ont contribué au ton plus positif observé sur les marchés. Cela semblait presque trop beau pour être vrai.
Tarifs douaniers : le jour de désamorçage
Le lundi 12 mai, les États-Unis et la Chine ont convenu d’un « cessez-le-feu » de 90 jours dans ce qui, jusqu’à présent, ne pouvait être qualifié que d’escalade de la guerre commerciale. Dans le cadre de l’accord, les tarifs douaniers américains sur les produits en provenance de Chine devraient passer de 145 % à 30 % et les tarifs douaniers chinois sur les produits en provenance des États-Unis, de 125 % à 10 %. Les actions américaines ont bondi à la suite de l’annonce, en particulier dans les segments les plus cycliques des marchés4. Il faut toutefois se rappeler que les tarifs douaniers demeurent beaucoup plus élevés qu’ils ne l’étaient en 2024 et qu’ils ne l’ont été pendant la majeure partie des 100 années précédentes. Mais les marchés ont tendance à réagir à la dérivée seconde des nouvelles, c’est-à-dire au fait que la situation devient moins mauvaise.
Moyen-Orient : affaires, affaires, affaires
En se rendant au Moyen-Orient, le président Trump a effectué le premier voyage international de son deuxième mandat. D’importants accords de défense ont été conclus. L’Arabie saoudite a en effet accepté d’acheter des armes pour un montant d’environ 142 milliards de dollars5, ce qui représente la plus importante entente de défense jamais signée. De nombreux titres technologiques ont été tirés vers le haut en raison d’accords qui devraient permettre à Nvidia d’exporter des puces haut de gamme dans la région.
Indice des prix à la consommation aux États-Unis : un pays en désinflation
L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation aux États-Unis a diminué plus que prévu en avril pour un troisième mois consécutif. L’inflation globale est tombée à 2,3 %, son plus bas niveau depuis 2021, contre un sommet de 9,1 % en 20226. Les tarifs douaniers n’ont pas eu d’incidence importante sur les dernières données sur l’inflation, car de nombreuses entreprises avaient déjà accumulé des stocks pour tenter d’éviter d’avoir à relever les prix immédiatement après l’entrée en vigueur des tarifs douaniers. Parmi les autres données relatives à l’inflation, le coût des chambres d’hôtel et de motel a reculé de 10 points de base en avril, et les tarifs aériens ont également diminué7. Selon nous, cette situation était à prévoir, étant donné que le tourisme étranger aux États-Unis a fortement diminué au cours des derniers mois.
Réserve fédérale : une réduction plus tardive, mais plus importante?
La combinaison de la baisse des tarifs douaniers et des données encourageantes sur l’inflation donne à penser que la Réserve fédérale américaine (Fed) restera probablement en attente pour l’instant. Cette approche attentiste pourrait donner à la Fed la souplesse nécessaire pour réagir en fonction de l’évolution des conditions. Une reprise de l’inflation justifierait une réduction moins importante ou potentiellement une réduction des taux nulle, tandis qu’un affaiblissement du marché de l’emploi entraînerait probablement une nouvelle réduction du taux des fonds fédéraux. Comme la politique monétaire demeure restrictive, nous estimons que la Fed dispose d’une marge de manœuvre pour réagir et procéder à une réduction plus tardive, mais plus importante, si l’économie montre des signes soudains de faiblesse. Les swaps indiciels à un jour donnent maintenant à penser que le marché s’attend à deux réductions en 20258. Le président de la Fed d’Atlanta, Raphael Bostic, a déclaré qu’il s’attendait à une seule réduction cette année, à moins que l’incertitude ne se dissipe à la suite de la publication de données plus faibles9.
Politique budgétaire : « un beau et grand projet de loi »
Les républicains de la Chambre des représentants ont publié les dispositions fiscales de ce que le président Trump a appelé son « beau et grand projet de loi ». Parmi les principales propositions, mentionnons la prolongation de la Tax Cuts and Jobs Act de 2017, des allégements fiscaux temporaires sur la rémunération des heures supplémentaires, de nouvelles déductions pour les pourboires et des réductions de dépenses dans les programmes d’admissibilité. La trousse fiscale, ainsi que le projet de loi dans son ensemble, n’est pas dans sa forme définitive et fera l’objet de négociations supplémentaires au Congrès avant d’être promulguée.
Marché obligataire : l’approche du seuil?
Malgré la désescalade des tarifs douaniers, la diminution des attaques contre le président de la Fed, Jerome Powell, et un taux d’inflation modéré, les taux des obligations du Trésor américain à long terme ont augmenté au cours des dernières semaines. Le taux des obligations du Trésor à 30 ans a récemment atteint 4,97 %, un niveau inégalé depuis 202310, et tout juste en deçà du seuil de 5 % qui a fait en sorte que, deux fois cette année, le gouvernement a modifié sa position à l’égard des tarifs douaniers.
La hausse des taux a reflété un mélange complexe de risques de récession plus faibles, d’attentes d’une augmentation de l’inflation et d’inquiétudes concernant le déficit budgétaire américain, car le Congrès propose de nouvelles réductions d’impôt sans compenser les dépenses. Les inquiétudes concernant le déficit se sont également traduites par une hausse des prix des swaps sur défaillance de crédit du gouvernement américain. Même si le marché des titres du Trésor pourrait continuer de subir des pressions de la part des vigiles du marché obligataire, nous ne voulons pas céder à la panique. Les États-Unis ont de nombreux leviers à leur disposition en ce qui a trait à leur dette et à leur déficit. Nous nous attendons à ce que le plafond de la dette soit relevé (comme il l’a été en 2023 et à de nombreuses reprises auparavant), les investisseurs étrangers n’ont pas abandonné les bons du Trésor américain et la Fed ne devrait pas céder à la pression.
Europe : les plans de dépenses de l’Allemagne s’accélèrent
Le ministre des Affaires étrangères de l’Allemagne, Johan Wadephul, a déclaré que le pays soutiendrait les demandes des États-Unis visant à porter les dépenses de défense à 5 % du produit intérieur brut (PIB). Selon l’OTAN, l’Allemagne a consacré 2,4 % de son PIB à la défense en 2024. L’Allemagne se joint donc à la Pologne pour soutenir le plan Rutte. Ces 5 % seront divisés comme suit : 3,5 % pour les dépenses de défense traditionnelles, y compris les systèmes d’armes et le personnel, et 1,5 % pour les infrastructures, le renseignement et la protection civile. En appliquant cette répartition, les dépenses sont plus susceptibles de passer outre les obstacles politiques. Cette nouvelle constitue un argument supplémentaire pour ceux qui pensent que l’Europe a amorcé un virage sur le plan budgétaire et que la croissance pourrait s’améliorer au cours des prochaines années.
Confiance des consommateurs américains : il n’y en a pas beaucoup
Après la série de bonnes nouvelles et de discours positifs au cours de la semaine, il a été décevant de voir que la semaine s’est terminée par une publication des données sur l’indice de confiance des consommateurs américains de l’Université du Michigan, qui a atteint 50,8, soit le deuxième niveau le plus bas jamais enregistré. Cela donne à penser que les consommateurs sont inquiets sur les perspectives de croissance11. Les attentes à l’égard de l’inflation dans un an sont maintenant de 7,3 % et de 4,6 % dans 5 à 10 ans12. Un nouvel indicateur de ralentissement de la croissance et d’une inflation anticipée plus élevée vient complexifier encore davantage le processus décisionnel de la Fed.