Planification fiscale et successorale

Le REEE – à qui appartient-il vraiment?

Un jeune garçon écoute attentivement sa mère lire un livre

Il est clair que le régime enregistré d’épargne-études (REEE) est devenu un outil extrêmement populaire auprès des familles qui cherchent à épargner pour les études de plus en plus chères de leurs enfants. Ce qui n’est peut-être pas clair, toutefois, c’est qui détient les fonds d’un REEE à des étapes précises du cycle de vie du régime.

Qu’est-ce qu’un REEE? Un REEE est un contrat conclu entre une personne (le souscripteur, habituellement un parent ou un grand-parent), le ministre aux fins de la Loi canadienne sur l’épargne-études (c.-à-d. les paiements admissibles au titre des subventions pour l’épargne-études et des bons d’études) et une personne ou entité qui est le promoteur et l’administrateur du REEE. En vertu du contrat, le souscripteur peut nommer un ou plusieurs bénéficiaires (les futurs étudiants) et convient de verser des cotisations en échange de leurs avantages financiers futurs. Le ministre versera ensuite les subventions et les bons d’études dans le cadre du programme en fonction des conditions d’admissibilité, le déclencheur étant les cotisations, au nom des bénéficiaires.

Qui détient les fonds d’un REEE? En vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu du Canada (LIR), le souscripteur a droit au remboursement de toutes ses cotisations au REEE. Les paiements de subventions et de bons sont conservés en sus de la valeur du régime et, si un remboursement de cotisations est demandé, toute subvention ou tout bon versé à l’égard de ces cotisations remboursées est retourné au gouvernement, car les fonds ne sont pas utilisés à des fins d’études. Le remboursement des cotisations est reçu en franchise d’impôt, car il est effectué avec le produit après impôt.

Les paiements d’aide aux études (PAE) sont des paiements autorisés du REEE au bénéficiaire qui comprennent les cotisations, les revenus générés par le régime ainsi que les droits à des subventions et à des bons. Il s’agit de paiements expressément autorisés à des fins d’études qui doivent respecter des conditions précises. Ils sont gérés par le souscripteur du régime et ces paiements sont imposables pour le bénéficiaire du REEE qui ne gagne souvent aucun revenu ou un faible revenu, ce qui le place dans une faible tranche d’imposition globale.

Les paiements de revenu accumulé (PRA) sont des paiements non destinés aux études autorisés provenant de toute croissance résiduelle du régime au souscripteur d’un REEE. Ils sont lourdement pénalisés, en plus de l’application de la retenue d’impôt obligatoire, si le PRA est demandé en espèces. Cela dit, il est possible de verser un montant maximal de 50 000 $ dans le REER du souscripteur, à condition que le souscripteur dispose des droits de cotisation requis. Cela permettra d’éviter la pénalité et la retenue d’impôt et entraînera un report d’impôt des montants.

Qu’en est-il du bénéficiaire du REEE? En vertu de la LIR, le bénéficiaire du REEE profite habituellement de l’utilisation potentielle des fonds du REEE en les appliquant au coût de ses études et est également imposé sur tout montant de subvention et de croissance retiré du régime à titre de PAE. Malgré ces deux faits, le bénéficiaire du REEE ne détient habituellement jamais les fonds du régime, à moins qu’il n’endosse les deux rôles de souscripteur et de bénéficiaire du REEE.

Que se passe-t-il en cas de rupture de mariage? Ce qui pourrait brouiller cette question autrement claire de la propriété, ce sont les contraintes imposées à un REEE après la rupture du mariage ou de l’union de fait des parents du bénéficiaire du REEE. Le ou les souscripteurs demeurent le ou les titulaires du régime et le REEE demeure la propriété du ou des souscripteurs bien qu’un jugement rendu par un tribunal ou une entente de séparation puisse restreindre les retraits du REEE qui ne sont pas au bénéfice exclusif du bénéficiaire d’un REEE qui est l’enfant du couple qui se sépare. Les parties qui se séparent peuvent demeurer cosouscripteurs du REEE et continuer à gérer le régime au nom des bénéficiaires du REEE et y cotiser de façon indépendante. Sinon, elles peuvent diviser le REEE en deux régimes distincts avec un souscripteur pour chaque REEE sans pénalité.

Utilisation des ententes de séparation Les ententes de séparation peuvent apporter des précisions et créer une obligation juridique en ce qui a trait au traitement et à l’utilisation d’un REEE après la rupture d’un mariage. Les questions suivantes peuvent être déterminées, à condition qu’elles soient discutées et convenues :

  • Qui restera le souscripteur du REEE? Le REEE sera-t-il divisé entre les parties qui se séparent ou le compte complet sera-t-il transféré à l’un des souscripteurs?
  • Compte tenu des nouvelles responsabilités financières découlant de la rupture du mariage, qui continuera de cotiser au REEE?
  • Comment les retraits seront-ils traités et quelle est l’utilisation convenue des fonds? Cela pourrait être de financer les frais d’études immédiats (p. ex. pour le programme d’études supérieures actuel) à l’échéance de paiement ou de conserver certains montants dans le cadre d’un plan plus vaste de dépenses d’études à long terme (p. ex. les coûts associés à un programme d’études supérieures).
  • Que deviendront les fonds si un ou plusieurs bénéficiaires d’un REEE ne poursuivent pas d’études postsecondaires ou ont terminé leurs études et qu’il reste des actifs résiduels dans le régime?

Comment les lois provinciales ou territoriales sur le partage des biens familiaux traitent-elles les REEE? En règle générale, la législation sur le partage des biens familiaux au Canada s’entend des actifs détenus par l’un ou l’autre des conjoints au moment de la rupture du mariage, sans égard au titre de propriété juridique. Les biens comprennent généralement la maison familiale, les propriétés de vacances, les actifs de placement, les intérêts commerciaux, les comptes bancaires et les comptes de chèques, les comptes de retraite, les polices d’assurance et d’autres collections précieuses, comme les œuvres d’art, les véhicules et les actifs numériques. Il existe des exceptions à ce qui peut être inclus ou exclu, selon la législation provinciale ou territoriale et, dans certains cas, il est possible d’exclure des biens acquis avant la relation, bien que certaines conditions doivent s’appliquer pour leur exclusion. La question demeure toutefois : que faut-il faire au sujet des biens du REEE, étant donné l’intention première et l’objectif du compte, c’est-à-dire favoriser les études futures des enfants? Si les personnes qui se séparent ne peuvent se mettre d’accord sur la question du REEE, le tribunal tranche la question dans bien des cas.

Une affaire nous vient à l’esprit lorsque nous examinons la propriété des fonds d’un REEE après une rupture de relation concernant l’un ou les deux souscripteurs. En Colombie-Britannique, dans l’affaire C.A.S. c. A.M.S., 2002 BCSC 1558, la mère du bénéficiaire du REEE n’a pas suivi une ordonnance sur consentement délivrée à son divorce du père du bénéficiaire du REEE. La mère a retiré sans frais les montants du REEE et a même remplacé le bénéficiaire du REEE par d’autres personnes, malgré les restrictions prévues dans l’ordonnance interdisant une telle mesure.

La Cour a conclu que la mère, à titre de souscriptrice du REEE, avait manqué à son obligation fiduciaire envers son enfant à titre de bénéficiaire du REEE. Une obligation fiduciaire signifie habituellement qu’un bien doit être géré en mettant l’accent sur l’intérêt supérieur des bénéficiaires qui peuvent être propriétaires du bien ou avoir un droit sur le revenu qu’il génère. Il est important de mentionner l’obligation fiduciaire, car les bénéficiaires de REEE ne détiennent pas les fonds du REEE et n’ont habituellement pas droit au revenu du REEE. Toutefois, une relation fiduciaire a été créée entre le souscripteur et le bénéficiaire du REEE au moyen de l’ordonnance sur consentement qui obligeait la mère à détenir les fonds à titre de souscriptrice, mais à les gérer et à les utiliser exclusivement pour les études de son enfant à titre de bénéficiaire du REEE. Le tribunal a finalement donné raison au bénéficiaire du REEE en exigeant que les montants encore présents dans le REEE et ceux retirés soient versés au bénéficiaire du REEE avec intérêts. Cette affaire malheureuse montre que la question de la propriété d’un REEE peut devenir moins claire lorsque des jugements des tribunaux ou des ententes de séparation s’y mêlent.

Comment les tribunaux perçoivent-ils le REEE? L’opinion des tribunaux à l’égard du REEE varie et, parfois, la jurisprudence est incompatible avec leur approche.

En Alberta, la jurisprudence considère que les REEE doivent être traités comme des fonds détenus en fiducie pour les bénéficiaires des REEE et les REEE ne sont pas considérés comme des biens matrimoniaux assujettis au partage. L’une des principales préoccupations est de savoir ce qui se passe avec les fonds excédentaires du REEE une fois que tous les bénéficiaires du REEE ont terminé leurs études postsecondaires. La jurisprudence à cet égard dépend des faits, le produit résiduel étant parfois partagé également entre les bénéficiaires du REEE (voir Delorme c. Delorme, 2017, ABQB 699). Dans d’autres cas, les fonds restants ont été partagés à parts égales entre les souscripteurs, même si une seule des parties qui se séparaient était nommée souscriptrice du REEE (voir Bzdziuch c. Bzdziuch, 2001 ABQB 306).

En Ontario, les tribunaux ont conclu qu’un REEE ne fait pas partie des biens de l’un ou l’autre des conjoints devant faire l’objet d’une égalisation, mais les parties qui se séparent peuvent accepter de traiter le REEE comme un actif pour les enfants et de le conserver à des fins d’études. La jurisprudence en Ontario n’est pas nécessairement conforme à son approche de partage ou de maintien du REEE aux fins prévues. Certaines affaires indiquent que le REEE appartient au souscripteur et non au bénéficiaire et que les fonds doivent être partagés entre les personnes qui se séparent (voir Chong c. Donnelly, 2021 ONSC 5263) alors que dans d’autres cas, il a été déterminé que le REEE est détenu en fiducie pour le bénéficiaire, présumant que les trois certitudes pour une fiducie sont en place et que les fonds doivent être utilisés et détenus pour le compte des bénéficiaires du REEE (voir McConnell c. McConnell, 2015 ONSC 2243).

Comme c’est le cas pour la plupart des ruptures de mariage, il est essentiel d’obtenir de bons conseils précis pour comprendre comment un REEE doit être traité et comment il continuera d’être géré. Réfléchissez aux divers scénarios entourant une éventuelle séparation en ce qui a trait à certains des enjeux abordés dans cet article afin d’éviter toute surprise.

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