La semaine dernière, le rapport sur les emplois non agricoles aux États-Unis était un événement à ne pas manquer. Même si les données sur l’emploi peuvent modifier les attentes quant à la croissance économique, à l’inflation, aux taux directeurs et aux évaluations boursières, ce rapport revêtait une importance particulière, car les marchés attendent de savoir ce que la Réserve fédérale américaine (Fed) fera en matière de politique monétaire. Il présentait également un intérêt supplémentaire en raison des préoccupations liées à la politisation des données. Si les données avaient dépassé les attentes, le scepticisme quant à leur crédibilité aurait pu dominer le discours. Le rapport montre plutôt un ralentissement de la création d’emplois, en accord avec les données sur les emplois privés d’ADP.
Les données sur l’emploi favorisent une baisse des taux en septembre
Même si le rapport du 5 septembre montre un ralentissement de la croissance de l’emploi, il ne semble pas annoncer une récession. La demande de travailleurs a diminué, mais les mises à pied ont été limitées.2 L’offre de main-d’œuvre a également diminué en raison des départs à la retraite et de la réduction de l’immigration.3 Compte tenu du ralentissement de la croissance de l’emploi dans le rapport du 5 septembre, il semble désormais presque certain que la Fed réduira ses taux le 17 septembre. Une baisse de 25 points de base (pb) est entièrement prise en compte par le marché4 et nous ne serions pas surpris de voir certains membres du Federal Open Market Committee (FOMC), comme Christopher Waller et Michelle Bowman, voter en faveur d’une baisse de 50 pb. Toutefois, nous ne pensons pas que cela soit justifié à ce stade-ci. Le rapport montre que seulement 22 000 emplois ont été créés en août, tandis que les données de juin et de juillet ont été révisées à la baisse de 21 000. Le taux de chômage a grimpé à 4,3 %, ce qui est largement conforme aux prévisions consensuelles. Le nombre moyen d’heures de travail hebdomadaires a également diminué, ce qui peut être interprété comme un signe supplémentaire que les employeurs doivent réduire la charge de travail de leur personnel.5
Une bonne nouvelle pour les marchés?
Lorsque l’inflation est élevée,6 une croissance plus faible de l’emploi peut être interprétée comme une bonne nouvelle pour les marchés. Cela peut signifier que l’économie ne surchauffe pas et qu’une période prolongée d’inflation est peu probable. Cela peut également indiquer que plusieurs réductions de taux pourraient se profiler à l’horizon. La baisse des taux sur l’ensemble de la courbe des taux des obligations du Trésor peut soutenir les évaluations boursières. Le ralentissement de la croissance, les attentes d’inflation ancrées, la baisse des taux et les réductions de taux prévues laissent entrevoir des perspectives optimistes pour les actions.
Les ventes massives d’obligations à long terme ne sont pas une raison de paniquer
Vendredi, les taux d’intérêt se sont redressés sur l’ensemble de la courbe des taux des obligations du Trésor américain, à la suite de la publication de données sur l’emploi plus faibles que prévu, et l’attention des investisseurs s’est tournée vers les signes de ralentissement économique. Il s’agit d’un revirement important par rapport au début de la semaine, lorsque les craintes à l’égard de la hausse des taux des obligations du Trésor américain à 30 ans se sont intensifiées. Le délestage initial a été motivé par les inquiétudes à l’égard de l’inflation, les questions sur l’indépendance de la Fed et le malaise croissant à l’égard de la viabilité budgétaire des États-Unis. À la fin de la semaine, toutefois, ces préoccupations se sont apaisées et l’attention s’est tournée vers l’affaiblissement des données économiques, qui a fait plonger le taux des obligations à 30 ans sous la barre des 4,8 %.7
Les États-Unis n’ont pas été les seuls à subir des pressions à la hausse sur les taux à long terme — la France, le Royaume-Uni, le Japon et d’autres pays ont également connu des fluctuations semblables. Au Royaume-Uni et en France, la hausse des taux reflète un contexte politique de plus en plus complexe, où les décideurs pourraient devoir rajuster le tir pour s’attaquer à l’accroissement des déficits budgétaires. Malgré ces difficultés, les marchés boursiers du Royaume-Uni et de la France se sont bien comportés cette année, soutenus par leur surpondération structurelle des secteurs des banques et de l’industrie, l’accentuation de leurs courbes de taux et l’optimisme à l’égard des initiatives de dépenses budgétaires en Europe.
Ruée vers l’or
En raison des préoccupations à l’égard de la viabilité budgétaire et de l’indépendance des banques centrales, ainsi que des attentes à l’égard des baisses de taux de la Fed, l’or a connu une remontée importante au cours des dernières semaines. Depuis la mi-août, le métal précieux a bondi de plus de 8 % dans un contexte de hausse des taux des obligations souveraines à long terme, de tentative de congédiement de la gouverneure de la Fed, Lisa Cook, par la Maison-Blanche et de signes d’un changement de politique de la part du président de la Fed, Jerome Powell, lors du symposium de Jackson Hole.8 L’or a désormais enregistré trois semaines consécutives de hausse, sa plus longue série de gains en six mois, ce qui a fait grimper les prix à des sommets records de près de 3 600 $ l’once troy.9
Même si l’or a déjà enregistré des rendements à deux chiffres en 2023 et 2024, il a progressé de près de 35 % depuis le début de l’année10 et, selon nous, les facteurs fondamentaux qui sous-tendent son rendement demeurent fermement en place. Parmi ceux-ci, mentionnons :
- les achats persistants des banques centrales, qui ne montrent aucun signe de baisse;
- la demande des investisseurs pour des couvertures contre l’incertitude budgétaire et géopolitique;
- les perspectives d’une baisse des taux d’intérêt, qui pourraient réduire l’attrait relatif de la détention de liquidités.
En particulier, l’ensemble des investisseurs semblent enfin participer à la remontée de l’or. Après des années de faibles flux de capitaux et intérêt, les FNB or ont connu une remontée remarquable de la demande cette année.11 Les actions des sociétés aurifères ont également attiré davantage l’attention des investisseurs, comme en témoigne le rendement de 97 % enregistré depuis le début de l’année par l’indice NYSE Arca Gold Miners.12
La hausse rapide des prix de l’or et le regain d’intérêt pour les fonds aurifères pourraient se renforcer d’eux-mêmes. Une demande accrue des investisseurs peut faire grimper le prix, ce qui attire davantage l’attention des investisseurs. Compte tenu de la dynamique qui s’installe et des facteurs fondamentaux toujours en place, la ruée vers l’or ne fait peut-être que commencer, selon nous.